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 Bienvenue sur le site de Jean Caille
   (1913-2016)

Dédié à tous les prisonniers de guerre 

 

INCOHÉRENCE DES ORDRES, FAIBLESSE DE L’ARMEE FRANCAISE ET SUPÉRIORITÉ MANIFESTE DES FORCES ALLEMANDES

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 Junkers 87 "Stuka" en piqué  ( avec sirène hurlante)                       

Mon père est très remonté contre les politiciens de son époque et les « haut-stratèges » militaires comme il les appelle. Il fait état d’une armée désorganisée et équipée d’armes vétustes souffrant, de surcroît, d’un manque de munitions face à une armée allemande qui, inversement, était très bien commandée et bénéficiait d’un équipement ultramoderne. Mais qu’en est-il en réalité ?

Sur ce thème, voyons ce que nous offre la lecture de Durand, d'Ambrière, de Quinton et Claudel.

Très vite, je m’aperçois avec un certain étonnement que l’analyse de Jean est loin d’être subjective. Et, en tout premier lieu, je tiens à dire que sur de nombreux points, le témoignage de René Claudel, affecté à la section des transmissions de la 14e C.D.A.C essentiellement composée d’Algériens, ressemble à celui de mon père – du moins avant d’être fait prisonnier -.

                     LE FIGARO 19 mai 1940

Ils ne sont pas dans le même corps d’armée, mais R.Claudel, durant les premiers mois d’entrée en guerre, se situe aux alentours de Boulay, comme Jean. Lui aussi se fait les mêmes réflexions et tire les mêmes conclusions (point de vue apparemment partagé par les soldats de son unité) quant au sentiment bizarre de ne pas être en guerre les premiers mois, sur l’incohérence des ordres et sur le fait qu’aucun plan n’est établi, donnant une image peu rassurante de la hiérarchie militaire et « provoquant une grande anxiété parmi les troupes » ; Par ailleurs, de la même façon que Jean, il s’indigne du comportement des journalistes et déplore les nombreux déplacements des troupes les premiers mois, aussi pénibles qu’inutiles selon lui :


« Nous avions des discussions sur ces changements fréquents de cantonnements. […] le cafard faisait son apparition, car l’image de la France en guerre n’était pas belle et l’avenir bien incertain. La presse, elle-même, au lieu de voir les événements objectivement, induisait en erreur l’esprit du pays pour lequel nous faisions notre devoir. Certains allaient jusqu’à dire que pour nous il ne s’agissait que d’une partie de camping. Est-ce qu’un peu de bienveillance n’aurait pas été de mise à notre égard ? Nous ne faisions qu’obéir aux ordres qui nous étaient donnés ! »

 

Francis Ambrière a d'ailleurs la même analyse sur la Presse en expliquant qu'elle a desservi le moral des soldats en salissant l'image de l'armée française :


"...Et cette image (de la France en guerre) n'était pas belle, et quelque effort que nous fissions, nous ne nous laissions pas d'en éprouver de l'amertume. Il y eut la presse, qui ne nous parut jamais aussi basse et aussi sale que dans ce temps-là. Même les feuilles hitlériennes de Paris occupé nous firent moins de mal, plus tard, en captivité, car enfin nous savions qui les payait [...] je me souviens de tel article qui nous resta longtemps sur le cœur. C'est celui où un chroniqueur réputé, parlant de notre guerre, assurait fin octobre qu'elle n'avait été jusqu'alors pour nous 'qu'une partie de camping un peu mouillée'. Quand on essuie depuis des semaines toutes les tornades du ciel, qu'on se couche et se réveille baignant dans la même humidité, qu'on patauge dans une glaise épouvantable et qu'il faut vider trois fois par jour, avec une vieille boîte de conserves, un abri où l'eau suinte de partout, la lecture d'une telle phrase suscite au creux des paumes un chatouillement qu'une bonne paires de gifles pourrait seule apaiser..."

 

 

Par la suite, lorsque l’assaut aura réellement débuté, la Presse là encore manquera au mieux de discernement, au pire manipulera l’opinion au sujet de supposées réussites Alliées voire minimisera les victoires allemandes. J’avais en ma possession des coupures de journaux de l’époque tout-à-fait édifiants dont certaines commentent la Bataille de France.

Comme Jean lors du repli de Lauterbach durant les premiers mois de guerre, la Compagnie dont fait partie R. Claudel entre également en Allemagne. Ce dernier, à l’unisson de ses camarades, s’émeut de l’incohérence des ordres reçus :


« Le 4 octobre, un ordre imprévu et incompréhensible fut donné aux unités qui occupaient la Sarre ou qui se trouvaient sur la frontière, d’évacuer celle-ci et de reculer jusqu’à une certaine distance. Nous avions le sentiment qu’en haut-lieu on cherchait plus ou moins à ménager les Allemands. Alors que plusieurs villages étaient tombés […] beaucoup pensaient qu’une vraie offensive suffirait à enfoncer le front adverse encore mal défendu, mais quelle illusion ! […] On aurait pu admettre un repli, alors que nous aurions été bousculés par l’adversaire, mais la prudente retraite que l’on nous faisait faire, alors que rien n’avait changé dans le cours des événements, nous semblait incompréhensible et inutile. A quoi avaient servi cette occupation et ces centaines de morts et ces nombreux blessés, souvent atrocement mutilés par les mines ? Le 22 RTA avait déjà payé de son sang l’imprévoyance et l’incompétence de certains. » (P. 15)


Et alors que la guerre fait rage entre troupes françaises et armée allemande, on ne compte plus les récits de soldats qui font état de repli faute de munitions et qui décrivent le manque de logistique militaire ou encore l’incapacité de leurs officiers qui, sans ordres précis et sans renseignements militaires, sont incapables de piloter leurs hommes. Ainsi le témoignage d’Adrien Teysonnière, cité par Y.Durand (p.21) engagé dans les combats à Dunkerque


« […]Or, lorsque j’ai eu tiré toutes mes munitions, je me suis replié à la nuit tombante vers l’arrière avec quelques camarades et n’ayant pas trouvé notre compagnie, nous sommes allés jusqu’au port pour essayer d’embarquer ; mais il n’y avait pas de bateau pour nous … »


ou encore Martinet Duffreix (p.21) qui, au sud d’Amiens, ne parle pas différemment : 


« […]Nous n’avions plus de munitions et nous étions encerclés. Nous n’avions pas de liaisons et nous attentions les ordres… ».

         LE JOURNAL 2/06/1940

     LE FIGARO du 17 mai 1940

Soldats allemands

http://ches-nazus.fr

Quant à Ambrière, il est totalement désappointé par la vétusté de l'équipement militaire :


"Devant ces traces de leur guerre (en parlant des vétérans de la guerre 14-18), je ne me sentais pas fier de la nôtre. Mais que faire ? [...] réduits à nous-mêmes, nous n'étions pas armés. Comme sous-officier, je possédais un révolver modèle 1872, énorme engin inopérant, avec 6 balles en plomb pour toutes réserves. Les 'deuxième classe' ne disposaient que de leurs poings. Quant à l'armement collectif de la batterie, il consistait, pour un effectif d'environ deux cent hommes, en trois vieux fusils mitrailleurs, modèle Saint-Etienne, qui s'enrayaient immanquablement à la quatrième balle ; c'est pourtant avec ces engins risibles qu'une note officielle nous enjoignait, le plus sérieusement du monde, d'abattre les avions allemands qui descendaient en piqué."


Tous les soldats qui ont vécu les bombardements et se sont trouvés confrontés aux soldats allemands ne peuvent que constater leur supériorité matérielle écrasante. Ainsi R. Claudel engagé dans la bataille de Belgique estime que cette supériorité manifeste additionnée au manque d’informations sur le terrain a abouti à des décisions particulièrement préjudiciables pour l’armée française :


« L’armée allemande était bien supérieure en nombre et en matériel aux armées alliées et notre aviation bien inférieure. Nous ne connaissions qu’imparfaitement la consistance des forces ennemies, et faute d’aviation suffisante, nous ne savions rien de leur dispositif. […] à la suite des entretiens des généraux Prioux, Blanchard et Billotte, et devant l’impossibilité de réunir à temps les moyens nécessaires, il fut décidé que la 1ère armée abandonnerait le canal de Charleroi, et continuerait son repli […] Si l’armée Allemande avait pu être retardée de quelques heures, la 1ère armée, 10 jours plus tard, aurait pu franchir la Deule et la Lys, et ainsi échapper à l’étreinte où elle devait succomber. »


Y.Durand qui témoigne que c’est le ressenti général des prisonniers mais ne semble pas partager cet avis ; selon lui :


« Les prisonniers croient pouvoir tirer de leur expérience la certitude d’une supériorité matérielle écrasante de l’ennemi, bien plus grande qu’elle n’était en réalité. […] Nombreux sont ceux qui croient encore aujourd’hui que le déséquilibre des forces fut la cause de la défaite. On sait que la supériorité matérielle en armement des Allemands sur les Français n’était cependant pas manifeste. »


Je suis assez étonnée par cette analyse mais je n’ai pas suffisamment d’éléments à ma connaissance pour la remettre en cause. Il semble que les blindés français aient été supérieurs en qualité aux blindés allemands. Pour autant, la rapidité avec laquelle les Allemands ont gagné cette guerre et les récits des combats tout comme le ressenti des soldats à ce sujet penche largement en faveur de l’hypothèse de la supériorité matérielle - du moins en nombre de pièces - de l’armée allemande (bien qu’elle se conjugue avec la médiocrité des grands chefs militaires, le manque de courage et les tergiversations des politiques de l’époque…).

Et que dire quand on laisse les Allemands récupérer à Dunkerque un arsenal militaire considérable que les Alliés ont abandonné sur place.

A Dunkerque, les Allemands découvrent le matériel abandonné par les Anglais

après la bataille 2 500 canons, 11 000 mitrailleuses, 75 000 véhicules et

90 000 soldats qui n’ont pu embarquer et qui sont faits prisonniers

dont 50 000 Anglais et 40 000 Français

 

 

D’ailleurs, j’ignore qui a rempli la rubrique concernant les forces de l’armée de l’air en présence sur Wikipédia, mais celui qui l’a renseignée semble bien informé. Il fait état de 2 255 avions (chasseurs, bombardiers, transport, observation et reconnaissance et renseignements confondus) - dont seulement 1 394 étaient français - , engagés en première ligne par les forces alliées contre  3 959 du côté des Allemands !